Littérature, Orthodoxie, Russie

À la recherche de Dieu dans un pays athée

22 septembre 2020

Pendant longtemps j’ai été la proie d’une angoisse. J’étais si déprimé que je ne savais que faire. J’avais beau m’adresser aux uns et aux autres, personne n’était capable de me dire d’où cela venait.

 

L’Annonciation, Novgorod, seconde moitié du XVIe siècle. Detail

 


 

J’ai essayé de boire, de m’enivrer à en perdre conscience pour m’évader, mais après ces beuveries, mon angoisse ne faisait que redoubler. J’ai essayé de m’absorber dans mon travail, j’ai tenté de devenir « activiste ». Je dois dire que ce fut pendant quelque temps une échappatoire, mais mon angoisse semblait me provoquer, comme si elle me disait : « Alors, tu essaies de te dérober ? Eh bien non, je suis toujours là. » Et cela avait pris de telles proportions que je laissais tout tomber ; exaspéré, je délaissais mon travail et, des semaines entières, je n’y allais plus ; je restais allongé et je cherchais la cause d’une telle angoisse. J’avais envie de me dévorer. J’ai même tenté de mettre fin à mes jours. Je ne sais pourquoi je n’y suis pas arrivé. Je me suis adressé à un psychiatre qui m’a d’abord donné des somnifères car je dormais mal ; mais après les avoir pris, au réveil, je me sentais complètement brisé et en proie à une angoisse encore plus grande. Disons franchement que ‘étais au bord de la folie. Mais, bien entendu, je n’étais pas fou ; j’étais sain d’esprit, comme on dit ; mes actes étaient tout à fait conscients et je me rendais compte de tout ce qui avait lieu. Malheureusement, je dois avouer que j’aurais été heureux de sombrer dans la folie pour perdre conscience et oublier l’angoisse qui me dévorait. J’avais envie d’aller en dire sur mon propre compte suffisamment pour qu’on m’enferme dans un asile. Heureusement cela n’a pas eu lieu.

Heureusement, il m’est arrivé ce qui pouvait m’advenir de mieux. Un tout petit livre m’est tombé entre les mains, un livre plus petit que tous ceux que l’on édite maintenant : le Nouveau Testament de notre Seigneur Jésus-Christ. Je me suis mis à le lire et un tout autre monde est apparu à mes yeux. Un monde de joie et de bonheur. Je lisais, je lisais, je ne pouvais me lasser de cette lecture. Chaque mot de ce Saint Livre pénétrait dans mon âme et j’ai connu un très grand bonheur : mon angoisse a disparu. Seul pourra me comprendre parfaitement celui qui aura, dans une certaine mesure, éprouvé cette angoisse. Elle a totalement disparu. J’ai cru au Christ, je me suis fait baptiser ; maintenant je vais à l’église, parfois j’essaie de chanter dans le chœur. Pourtant j’ai plus d’ennuis qu’auparavant : à la suite d’une compression du personnel, j’ai été licencié de mon travail, d’autre par mon père s’efforce de me faire enfermer dans un asile d’aliénés car ma foi est en contradiction avec ses convictions. Mais je suis heureux.

J’ai quitté tout naturellement les Jeunesses communistes. On a essayé de me proposer quelque chose, un travail intéressant, mais je refuse tout car je crains que mon angoisse ne revienne. Avec le Christ, je suis bien et je suis heureux. J’ai voulu enter au séminaire, mais, pour l’instant, cela ne marche pas pour des causes indépendantes de ma volonté. Je suis disposé à accomplir le travail le plus insignifiant, le plus ingrat, à travailler comme homme de peine ou comme gardien dans une église, simplement pour être le plus près possible du Christ.


Dimitri Doudko, L’Esperance qui est en nous, p. 29-30, Éditions du Seuil, Paris, 1976


 

 


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