Saint Cyprien de Carthage
Quoi de plus astucieux, quoi de plus subtil que notre ennemi ?
Jésus, en s’incarnant, triomphe de ses artifices et de sa puissance ; alors, en effet, la lumière se montre aux nations pour les sauver ; les sourds entendent la voix de la grâce ; les aveugles ouvrent les yeux pour voir le Dieu véritable ; les infirmes reviennent pour toujours à la santé ; les boiteux courent à l’Église ; les muets, sentant leur langue se délier, font entendre l’accent de la prière.
Mais l’ennemi ne s’avoue pas vaincu. Voyant les idoles abandonnées et ses temples désertés par la foule devenue croyante, il imagine un nouveau piège afin de tromper les impudents par l’apparence même du nom chrétien. Il invente les hérésies et les schismes pour troubler la foi, corrompre la vérité, scinder l’unité. Il séduit ceux qu’il ne peut retenir dans la voie des anciennes erreurs, et il les trompe en leur montrant de nouveaux chemins. Il ravit les fidèles à l’Église, et tout en leur persuadant qu’ils évitent la nuit du siècle et qu’ils approchent de la lumière, il les plonge, sans qu’ils s’en aperçoivent, dans de nouvelles ténèbres. Ainsi, déserteurs de l’Évangile et de la loi de Jésus-Christ, ils s’obstinent à se dire chrétiens ; ils marchent dans les ténèbres, et ils croient jouir de la lumière.
L’ennemi les flatte, il les trompe, cet ennemi qui, selon l’apôtre, se transfigure en ange de lumière, qui transforme ses ministres eux-mêmes en prédicateurs de la vérité, donnant la nuit au lieu du jour, la mort au lieu du salut, le désespoir à la place de l’espérance, la perfidie sous le voile de la foi, l’antichrist sous le nom adorable du Christ. C’est ainsi qu’au moyen d’une vraisemblance menteuse, ils privent les âmes de la vérité.
Histoire et œuvres complètes de Saint Cyprien, évêque de Carthage, Tome Deuxième, De l’unité de l’Église, Cattier, Libriaire-Éditeur, Tours, 1869, p. 111
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