Eschatologie, Histoire, Les pères de la foi, Luminaires de l'Église, Martyrs, Œcumenisme, Orthodoxie

SUR CES MOTS : Il viendra dans sa gloire juger les vivants et les morts, et son règne n’aura point de fin. II/II

22 septembre 2022

 Saint Cyrille, patriarche de Jérusalem

QUINZIÈME CATÉCHÈSE BAPTISMALE

Le démon préoccupera les hommes contre le dernier avènement par mille impostures.

L’Antichrist, puissant magicien, envahira l’empire Romain, trompera les Chrétiens, abusera de la crédulité des Juifs, séduira les Gentils par ses prestiges.

De même que, longtemps avant l’incarnation du Sauveur, le démon sachant qu’il était attendu et devait naître d’une vierge, avait prévenu l’heureux effet qui en devait résulter pour le salut des hommes, par d’affreuses calomnies, de même qu’il avait jeté adroitement au milieu des nations idolâtres les histoires fabuleuses de dieux générateurs et de dieux engendrés avec ou sans concours de femmes, dans l’espérance que l’erreur étant partout profondément enracinée, la vérité ne pourrait jamais se faire jour, de même encore aujourd’hui, prévoyant le futur et le second avènement du Sauveur, et mettant à profit la stupidité des Gentils, la sotte crédulité des Juifs, leur fol espoir dans un libérateur, il lancera au milieu des nations un magicien profondément versé dans l’art diabolique des enchantements, des sortilèges et des prestiges, et par ce moyen entraînera dans l’abîme avec lui ceux-là qui attendent un Messie libérateur, tous ces peuples encore livrés au culte stupide des idoles. À leur tête il s’emparera de l’Empire Romain, prendra le nom de Christ ; sous ce nom il trompera les circoncis ; à force de prestiges il entraînera les idolâtres.

 

Époque de son avènement ; ses exploits militaires. Il favorisera d’11bord le christianisme, puis en deviendra le plus furieux et le plus cruel persécuteur. Son règne ne sera que de trois ans et demi.

L’Antichrist paraîtra, lorsque les destinées de Rome seront accomplies. Alors la fin du monde sera proche ; sur les débris de cet Empire s’élèveront dix rois qui régneront peut — être en divers lieux, cependant en même temps. À ces dix rois succédera l’Antichrist. Car à l’aide d’opérations magiques, il usurpera l’Empire Romain, il humiliera trois de ces rois, il s’assujettira les sept autres. (Dan 7,24) En profond politique on le verra d’abord affecter la démence, la modération, et surtout une grande philanthropie. Et après avoir séduit les Juifs par de faux prodiges, s’être fait reconnaître d’eux pour le Messie qu’ils attendaient, il jettera le masque, et surpassera en scélératesse, en cruauté, tout ce que l’injustice, la férocité, l’impiété auront pu produire de plus monstrueux dans les siècles antérieurs. (Dan 7,24)

L’humanité entière gémira sous le joug de cet ennemi impitoyable, sanguinaire, perfide et astucieux. C’est surtout contre nous chrétiens, que sa fureur satanique se déploiera. Mais après un règne de trois ans et demi, s’effectuera le second avènement du Fils unique de Dieu, du Sauveur des hommes, du vrai Christ, qui viendra enfin mettre un terme aux iniquités dont la terre sera désolée, qui de son souffle fera disparaître ce cruel, mais dernier fléau de l’humanité, et l’enchaînera à jamais au fond des abîmes éternels.

 

Preuves tirées de Daniel

Voilà ce que nous enseignons appuyé, non pas sur des conjectures, mais sur les Livres saints dont l’Église est dépositaire, et notamment sur ce texte du prophète Daniel, dont nous venons de prendre lecture et dont l’archange Gabriel nous a lui-même donné l’explication en ces termes : La quatrième bête sera le quatrième empire sur la terre qui absorbera tous les autres empires. (Dan 7,23)

Or, tous les auteurs ecclésiastiques s’accordent à voir dans l’Empire Romain ce quatrième empire dont parle l’archange. Selon eux le premier fut celui des Assyriens ; le second, celui des Mèdes et des Perses ; le troisième, celui des Macédoniens ou des Grecs ; le quatrième enfin, celui des Romains.

L’Ange continuant son explication vous dit encore : La bête est armée de dix cornes qui représentent dix rois. Qui s’élèveront de ce même royaume. Il s’en élèvera un autre après eux qui sera plus puissant et plus méchant que ceux qui l’auront devancé. (Ibid. 24) C’est-à-dire, que tous ceux qui auront jamais régné avant lui. Des dix rois, il en humiliera trois ; or, il en restera sept, et il sera le huitième. Il lancera des blasphèmes contre le Très-Haut. (Apo 16,11 ; Dan 7,25) Tels seront les actes de cet impie blasphémateur, de ce contempteur des lois, qui parviendra à la puissance suprême, non par voie de succession légitime, mais par voie de sortilèges et de magie.

 

L’Antichrist sera l’instrument immédiat de Satan ; ce sera Satan lui-même qui opérera en personne. Ses miracles ne seront que des prestiges.

Quel sera-t-il enfin ? Quel esprit l’animera ? Paul, faites-nous le connaître : Cet impie qui doit venir revêtu de la puissance de Satan, se fera connaître par toutes sortes de prodiges et de signes trompeurs. (II Th 2,9)

Ici l’Apôtre nous fait voir l’Antichrist comme un instrument dans les mains de Satan ; et celui-ci personnifié, et opérant par lui et dans lui. Convaincu de la fin prochaine de son règne, persuadé que l’heure de son jugement va sonner, ce ne sera plus par ses lieutenants qu’il fera la guerre à l’Éternel, mais il la fera par lui-même et ouvertement. Il mettra en jeu toutes ses ressources de mensonges, de fourberies et de prestiges. Car celui qui est le Père du mensonge (Jn 8,44) fera des œuvres mensongères, couvertes des apparences de la vérité ; de manière que le peuple fasciné croira voir un mort ressuscité, et ne verra qu’un fantôme ; il redressera des boiteux, il rendra la vue aux aveugles, et ses guérisons seront imaginaires.

 

II se montrera zélé enthousiaste du temple de Jérusalem. Il ne paraîtra que lorsqu’il ne restera aucun vestige du temple ancien de Jérusalem.

L’Apôtre continue en ces termes : Cet ennemi de Dieu qui s’élèvera au-dessus de tout ce qui est dit Dieu ou divinité ; (car il fera la guerre à toutes les idoles) jusqu’à s’asseoir dans le temple de Dieu. (Ibidem)

Quel sera ce temple ? L’Apôtre sait bien que le temple des Juifs aura été détruit. À Dieu ne plaise qu’il voulût parler de celui où nous sommes réunis ! Mais pourquoi disons-nous cela ? Pour ne pas paraître nous flatter nous-mêmes. Car si l’Antichrist doit se présenter aux Juifs, comme le Messie, ou le Christ qu’ils attendent, il voudra en être adoré ; et pour mieux les séduire, il manifestera un grand zèle pour la reconstruction de leur temple. Il se dira issu du sang de David, destiné à relever le temple de Salomon. Mais, lorsqu’il viendra, il ne trouvera pas pierre sur pierre sur la place où fut jadis la maison du Seigneur, suivant l’arrêt porté par le Sauveur lui-même. Car il viendra, lorsque le temps aura fait disparaître toutes les pierres, et que celles mêmes qu’on aura réunies sous le prétexte de reconstruction auront été totalement dispersées par des motifs quelconques. Je ne parle pas de l’enceinte extérieure, mais de l’intérieur où étaient les chérubins. Alors il viendra avec toutes sortes de signes et de prodiges mensongers. (II Th 2,9) Il fera d’abord la guerre à l’idolâtrie ; il affectera dans le principe une tendre philanthropie. Jetant ensuite le masque, il fera à l’humanité une guerre d’extermination, surtout contre les enfants de Dieu. Car, dit Daniel, Je voyais, et de sa corne il faisait la guerre aux saints. (Dan 7,21) Puis ailleurs : Ce sera un temps d’affliction ; affliction telle qu’aucune nation n’en aura éprouvé une pareille sur la terre jusqu’à ce moment. (12,1)

En présence de cette épouvantable bête, devant cet effroyable dragon, aucune force humaine ne pourra résister ; car il dévorera tout ce qui se trouvera devant lui.

Mais, quoique les Livres saints nous offrent sur ce sujet une intarissable source d’instruction, nous nous arrêterons cependant, parce qu’il faut mettre un terme à nos paroles.

 

Ceux qui se sentiront assez de fermeté devront lui résister et le combattre, et les autres devront prendre la fuite

Le Seigneur dans sa miséricorde, prévoyant les violences auxquelles devait se livrer son ennemi, n’a pas laissé sans secours les âmes pieuses. C’est à elles qu’il a adressé ces paroles de consolation : Que ceux qui se trouveront alors dans la Judée, fuient dans les montagnes. (Mt 24,16) S’il en est qui se sentent d’une assez grande force, pour combattre Satan et lui faire face, qu’ils restent (car je ne désespère ni de la force ni de la vigueur de l’Église) et qu’ils se disent à eux-mêmes : Qui nous séparera de l’amour de Jésus Christ ? (Rom 8,35) Mais quant à ceux qui se sentiront défaillir, qu’ils se mettent en lieu de sûreté, tandis que les braves feront tête à l’ennemi. Car je le répète : Ce sera une affliction telle, que depuis la création il n’en aura pas été vu de pareille, et il n’en sera jamais vu. (Mt 24,21) Au reste, grâces soient rendues au Seigneur de ce que dans sa miséricorde il a daigné restreindre dans un cercle de peu de jours cet effroyable torrent de calamités. Car il nous dit : Mais, en faveur des élus, ces jours de désolation seront abrégés. (Ibid. 22) Le règne de l’Antichrist ne sera que de trois ans et demi. Ce n’est pas d’après des livres apocryphes que nous parlons ici, mais d’après le Prophète Daniel, dont voici les expressions : Et il lui sera donné, pour exercer sa puissance, un temps, des temps, et la moitié d’un temps. (Dan 7,25) Un temps, c’est une année, et dans cette année sa puissance s’accroîtra sensiblement ; puis deux temps ou deux années mettront le comble à son impiété ; la moitié d’un temps ou les six mois qui suivront mettront un terme à son empire et à sa vie. C’est ce que répète encore le même Prophète en ces termes : Il a juré par le Dieu vivant dans l’éternité que cela arrivera dans le temps, les temps et la moitié d’un temps. (Ibid. 12,7)

C’est peut — être encore à notre opinion que se réunissent ceux qui ont commenté ces autres paroles de Daniel : Mille deux cent quatre-vingt-dix jours (Ibid. 11), et celles-ci : Bienheureux celui qui attend, et qui parvient au treize cent trente-cinquième jour. (Ibid. 12) C’est pourquoi il faudra se cacher et fuir. Car peut-être n’aurons-nous pas achevé d’instruire toutes les villes d’Israël avant la venue du Fils de l’homme. (Mt 10,23)

 

Les Martyrs de cette époque seront supérieurs en gloire et en mérite à tous ceux qui les auront précédés dans cette carrière. Dieu laissera agir l’Antichrist, comme tous les autres persécuteurs, pour confondre les infidèles et exercer la patience des élus.

Quel sera alors l’heureux mortel qui sacrifiera généreusement sa vie pour le nom de Jésus ? Quant à moi, je n’hésite pas à mettre au-dessus de tous les martyrs, ceux qui verseront alors leur sang pour la foi. Jusqu’à ce jour terrible ceux qui auront combattu, n’auront encore lutté qu’avec d’autres hommes. Mais tel qui combattra contre l’Antichrist, se trouvera corps à corps aux prises avec Satan en personne. Les rois qui jusqu’à ce jour auront persécuté l’Église n’auront jamais employé de moyens plus violents que la mort ; ils ne se seront jamais donnés pour des thaumaturges ; jamais ils n’auront évoqué les morts, pour faire de leurs ombres le simulacre des résurrections. Celui-ci joindra à la fureur du glaive tous les genres de déceptions, de manière à séduire même les élus, s’il est possible. (Mt 21,24)

Mais, pour que l’apostasie ne crût pas se justifier, en se disant à elle-même : « Qu’a fait de plus le Christ ? D’où celui que nous voyons, tient-il le pouvoir d’opérer tant de merveilles ? Si Dieu ne l’eût pas voulu, s’il ne l’eût pas permis, cela ne serait pas. » Mais l’Apôtre, pour vous fortifier et vous faire tenir sur vos gardes vous a dit d’avance : C’est pourquoi Dieu leur enverra des illusions si efficaces, qu’ils croiront au mensonge (ce mot : enverra est mis ici pour : il permettra), non pas que ces illusions puissent leur servir d’excuses, mais pour qu’elles soient contr’eux un motif de condamnation. Et pourquoi ? Parce qu’ils n’auront pas cru à la vérité, c’est-à-dire, à Jésus Christ, mais parce qu’ils auront consenti à l’iniquité, c’est-à — dire, à l’Antichrist. (II Th 2,10-11)

Dieu permettra alors ces épreuves, comme il les a permises, et permettra encore dans les persécutions qui s’élèvent de temps à autre contre l’Église. Ce n’est pas qu’il ne puisse les empêcher, mais c’est qu’avant de couronner ses athlètes, il veut éprouver leur patience, comme il a mis à l’épreuve celle de ses prophètes et de ses apôtres. Il veut, avant de les mettre en possession de son héritage éternel, qu’ils s’en rendent dignes par des travaux héroïques, mais de courte durée. C’est ce qu’a dit le prophète Daniel : Et dans ce temps sera sauvé tout votre peuple qui est inscrit dans le livre (il est évident qu’il parle ici du livre de vie). Beaucoup de ceux qui dorment au sein de la terre se réveilleront : les uns pour la vie éternelle, et les autres pour être livrés à l’opprobre, à l’ignominie dans les siècles infinis. Ceux qui auront été intelligents, brilleront comme la splendeur du firmament, et beaucoup de justes seront comme des étoiles dans les siècles des siècles et au-delà. (Dan 12,1-3)

Nous devons prémunir nos enfants contre l’apparition de I’ Antichrist. Nos enfants sont ceux que par l’instruction nous engendrons à la foi.

O vous qui m’écoutez, tenez-vous donc sur vos gardes. Vous venez d’entendre les signes auxquels vous reconnaîtrez l’Antichrist. Ne vous contentez pas de les retenir dans votre mémoire pour vous seuls ; sans jalousie faites-en part à tout le monde. Si la nature vous a donné un fils, instruisez-le, avertissez-le, fortifiez-le contre les dangers à venir ; si sur les fonts de baptême vous avez donné à l’Eglise un enfant, précautionnez-le contre toutes espèces de séductions, afin qu’il ne quitte pas la voie de la vérité, pour se jeter dans les sentiers de l’erreur. Car déjà le mystère d’iniquité s’accomplit. (II Th 2,7) Les guerres de nations à nations m’épouvantent ; les dissensions qui déchirent l’Église m’effraient ; les haines particulières qui éteignent la charité chrétienne, me font peur. Au reste, j’en ai dit assez. Puisse le ciel ne pas nous rendre témoins de tous ces malheurs ! Soyons cependant sur nos gardes. Arrêtons-nous. Voilà ce que nous avions à dire sur l’Antichrist.

 

Dernier avènement de Jésus-Christ

Parlons maintenant du second avènement de Jésus Christ. Attendons-nous à le voir du haut des cieux au milieu des nuages descendre sur la terre. C’est alors qu’on entendra sonner les trompettes de la milice céleste. Ceux-là qui sont morts en Jésus Christ, ressusciteront les premiers ; les justes qui seront encore sur la terre, seront emportés dans les nuées, pour recevoir la récompense due à leurs travaux, pour être couronnés dans leurs corps d’une manière plus sublime, comme des athlètes qui ont combattu au-delà des forces humaines. Ainsi que l’a dit l’Apôtre : Car aussitôt que le signal aura été donné par la voix de l’archange, et par le son de la trompette, le Seigneur lui-même descendra du ciel ; et ceux qui seront morts en Jésus Christ ressusciteront d’abord. Puis nous autres qui serons vivant, et qui aurons été réservé, jusqu’à ce jour nous serons emportés avec eux dans les nuées pour aller au-devant du Seigneur au milieu de l’air. Et c’est ainsi que nous serons pour jamais avec le Seigneur. (I Th 4,15-16)

 

Les Prophètes, les Apôtres, ont vu cet avènement dans l’avenir.

L’auteur de l’Ecclésiaste avait aussi vu ce dernier avènement du Seigneur et la consommation des siècles, lorsqu’il écrivait : Réjouissez-vous donc, jeune homme, dans votre jeunesse, etc. Bannissez la colère de votre cœur, éloignez le mal de votre chair, souvenez-vous de votre Créateur, avant que les jours d’affliction soient arrivés… Avant que le soleil, la lumière, la lune et les étoiles s’obscurcissent… et que ceux qui regardaient par les trous voient enveloppés de ténèbres. C’est-à-dire, avant que nous soyons privés de la faculté de voir. Avant que la chaîne d’argent, c’est-à-dire, la voûte étoilée, ou la voie lactée soit rompue, et que l’anthemion d’or soit brisé : Par ces mots il entend le soleil dont l’aspect est d’or. Car l’Anthemis (héliotrope) plante assez connue, porte dans sa fleur ou corolle des pétales rangés orbiculairement comme des rayons solaires. (Ec 11,9-10 ; 12,6) Quand on se lèvera au gazouillement du passereau, qu’on regardera d’un lieu élevé et qu’on ne trouvera que terreur sur les chemins, (Ec 12,4-5) que verra-t-on ? C’est alors qu’on verra le Fils de l’homme venir sur les nuées du ciel, (Mt 24,30) et la désolation se répandre de tribus en tribus. (Za 12,12) Que se passera-t-il en ce moment ? L’amandier entrera en fleurs, la sauterelle s’engraissera, le câprier se desséchera. (Ec 12,5) De même, disent les interprètes, que la fleur de l’amandier ne paraît qu’au printemps, ce sera dans la même saison que nos corps brilleront dans tout leur éclat, comme l’arbre dans sa floraison ; de même que la sauterelle reprendra son embonpoint, ainsi l’âme volera avec ardeur, quoique enveloppée de son corps ; de même que le Capparis se desséchera, ainsi disparaîtront les méchants, comme de viles épines.

Vous connaissez maintenant tous ceux qui ont prédit le dernier avènement du Sauveur. Vous voyez comment ils ont entendu la voix du passereau. Apprenons nous-mêmes à l’entendre. Car, aussitôt que le signal aura été donné par la voix de l’archange, le Seigneur lui — même descendra du ciel, au son de la trompette de Dieu. (1 Th 4,15) L’archange proclamera les ordres du Très-Haut, et criera au milieu des tombeaux : Levez-vous, sortez à la rencontre du Seigneur. (Mt 6,6-7 ; Ep 4,14) Cette descente sera terrible. Écoutons le Roi-Prophète : Dieu viendra dans toute sa splendeur. Oui, notre Dieu viendra, et ce ne sera par dans le silence. Un feu dévorant courra devant lui, il sera escorté d’une violente tempête. (Ps 49,3) Il viendra le Fils de l’homme, il s’avancera jusqu’à l’Ancien des jours. (Dan 7,13) Ainsi que le dit le Prophète dont nous avons fait lecture, il viendra porté sur les nuées du ciel. Ses yeux seront des torrents de feu, dans lesquels les mortels seront éprouvés. Celui qui aura pour lui des œuvres d’or, en sortira plus éclatant ; celui-là, au contraire, qui n’aura que des œuvres futiles sera, comme la paille, la proie des flammes. Et l’Ancien des jours paraîtra sur son trône, vêtu de blanc comme neige, sa chevelure le disputera à la laine la plus pure. (Dan 7,9) C’est du langage des hommes que le Prophète emprunte les couleurs dont il trace la peinture qu’il fait de Dieu. Pourquoi ? Pour nous montrer que celui dont il parle, n’est pas le Dieu de ceux qui sont souillés d’iniquités. Car, dit-il, j’effacerai vos péchés, et je vous rendrai blancs comme neige et comme la laine la plus pure. (Is 1,18) Ce qui sera le signe de l’innocence ou de la rémission des péchés.

Le Seigneur qui s’est élevé au ciel sur les nuées, (Ac 1,9) descendra du ciel sur les nuées. Car c’est lui-même qui a dit : Et ils verront le Fils de l’homme qui viendra sur les nuées du ciel, avec une grande puissance, et avec une grande gloire. (Mt 24,30)

 

La croix en sera le signe précurseur. Au son de la trompette l’humanité toute entière se réveillera. Les Anges réuniront les justes de tout âge, de tout sexe el de toute condition

Quel sera le signe infaillible de son avènement ? Car il doit être tel qu’aucune puissance ennemie ne le puisse imiter. Alors le signe du Fils de l’homme, est-il dit, paraîtra dans le ciel. (Mt 24,30) Mais quel est le véritable signe et le seul propre à notre Seigneur Jésus Christ ? C’est incontestablement sa croix. C’est sous cet étendard lumineux que paraîtra le Roi des rois, qui fut crucifié, pour qu’à la vue de ce signe les Juifs, les auteurs de sa Passion, qui l’ont environné d’embûches, le reconnaissent, et que dans leur effroi on les entende s’écrier de tribus en tribus : « Voilà celui que nous avons souffleté et conspué ; voilà celui que nous avons lié, garrotté, flagellé ; voilà celui d’entre nous que nous avons crucifié, après en avoir fait le sujet de nos dérisions. Où fuirons-nous ? Où chercherons-nous un asile contre sa colère ? » En effet, cernés de toutes parts par des légions d’anges, ils ne pourront se soustraire à sa vengeance. La croix sera pour ses ennemis un sujet d’horreur et d’épouvante, et un sujet de triomphe pour ceux qui auront cru en elle, qui l’auront prêchée, qui auront souffert pour elle. Heureux le mortel que le Christ reconnaîtra alors pour son ami !

Car ce Roi dans sa puissance, dans sa gloire, au milieu de ses légions d’anges, assis à la droite de son Père, reconnaîtra, ses fidèles serviteurs. Et pour que les élus ne soient pas confondus avec les réprouvés, il enverra ses anges qui feront entendre la trompette éclatante, et qui rassembleront les élus des quatre vents. (Mt 24,31) Si Dieu ne perdit pas de vue Loth qui dans Sodome se trouvait être l’unique juste, comment pourrait-il confondre tant de milliers de justes avec tant de réprouvés ? VENEZ, dira-t-il, à ceux que les anges auront rassemblés, qui accourront à lui, portés sur les nuées, venez, vous élu les béni, de mon Père. (Ibid. 25,34)

Ouverture du livre des consciences

Parmi vous, quelqu’un pourrait peut-être dire : « Je suis pauvre, et au milieu de celle catastrophe je pourrais par hasard être surpris par la maladie dans mon lit, privé de forces et de secours ; et moi, femme, je serai peut-être au moulin ; ne nous laissera-t-on pas de côté, comme des êtres méprisables ? » Rassurez-vous, homme ; le souverain Juge ne fait acception de personne. Il ne jugera pas suivant le rang qu’on tient dans le monde ; et l’éloquence n’aura aucun accès devant lui. (Is 11,3) Le savant comme l’ignorant, le riche comme le pauvre, comparaîtront tous également ; et fussiez-vous égaré dans les champs, les anges sauront vous recueillir. (Mt 24,40)

Ne vous imaginez pas qu’alors il ne s’agira que des maîtres de la terre, que l’homme des champs sera délaissé. Pauvres ou esclaves, soyez sans inquiétude. Celui qui a paru au milieu de nous sous la forme de l’esclave, ne méprisera pas alors l’esclave. Fussiez-vous alors gisant dans un lit de douleur, vous n’y serez pas oublié ; car il est écrit : De deux personnes qui seront couchées dans le même lit, l’une sera prise, l’autre laissée. (Luc 17,34)

Si le besoin ou la nécessité vous retient au moulin, soit homme soit femme, si vous avez des enfants, si vous êtes condamné à tourner la meule, rassurez-vous : Celui qui délivra et mit en liberté ceux qui étaient dans les fers (Ps 67,7) ; celui qui sut affranchir Joseph, le porter de la prison sur les marches du trône, saura aussi vous racheter, mettre un terme à vos maux, et vous donner une place dans le royaume des cieux. Prenez seulement courage, travaillez sans relâche, combattez gaiement. Car aucune de vos bonnes actions ne sera perdue. Tout est scrupuleusement écrit ; vos prières, vos oraisons, vos aumônes, vos jeûnes, votre vie passée, soit dans un mariage chaste et chrétien, soit dans le célibat, soit dans la viduité supportée en vue de Dieu, tout est écrit dans le livre de vie. C’est à la virginité, c’est à la continence que les plus belles couronnes sont réservées, et l’éclat des vierges le disputera à celui même des anges.

Mais si vous avez pris plaisir à considérer avec moi le tableau des récompenses destinées aux justes, il faut également vous résoudre à écouter avec patience le sort que la justice divine réserve aux méchants. Car il faut vous le dire : vous trouverez aussi écrits toutes vos rapines toutes vos injustices, vos fornications, vos parjures, vos blasphèmes, vos empoisonnements, vos homicides, et tous les péchés que vous pourriez avoir eu le malheur de commettre après votre baptême ; car tous ceux commis antérieurement seront effacés.

 

Explication de ces mots : Juger les vivants et les morts. Le nombre des Anges surpasse celui des hommes, comme le ciel supplante en étendue toute la terre.

Quand le Fils de l’homme viendra, ce sera dans toute sa gloire, et tous les anges seront avec lui. (Mt 24,31) Voyez, ô homme ! en présence de quelle multitude de témoins vous comparaîtrez au tribunal de Dieu. Toute la création assistera à votre jugement. Mettez-vous sous les yeux cette innombrable nation romaine qui est existante aujourd’hui, cette multitude de barbares qui vivent actuellement hors de l’Empire ; ajoutez à votre calcul tous ceux que la mort a moissonnés depuis un siècle ; à ce siècle ajoutez-y encore mille ans, que dis-je, entassez toutes les générations réduites en poudre depuis Adam jusqu’à vous : ce nombre, s’il en est un, nous épouvante. Eh bien ! il est encore peu de choses en comparaison de celui des esprits célestes. Tous ensemble forment un troupeau de quatre-vingt dix-neuf brebis, tandis que le genre humain pris collectivement n’en fait qu’un. (Mt 18,12 ; Luc 15,4) Car si on peut estimer approximativement une population quelconque sur l’étendue de son territoire, et si la terre n’est qu’un point relativement à l’espace qu’occupe l’univers entier, si le ciel qui enveloppe la terre, contient une population proportionnée à son extension ; on trouvera que le nombre des esprits célestes est infiniment au-dessus de tout ce que la terre a pu produire et contenir d’hommes depuis la création. Au reste, nous lisons dans les Livres saints : Mille milliers d’anges le servaient, et dix mille dizaines de millier, l’escortaient. (Dan 7,10) On voit ici que le Prophète n’a pas voulu en spécifier le nombre, mais nous donner seulement une idée approximative de leur prodigieuse multitude.

Dieu le Père siégera assisté de Jésus Christ, en présence du saint Esprit. C’est alors que la trompette des anges nous citera tous au redoutable tribunal ; nous y comparaîtrons tous chargés de nos œuvres bonnes ou mauvaises. Cette attente ne doit-elle pas, dès ce moment même, nous frapper d’une terreur salutaire ? Ne croyez pas, vous qui m’écoutez, qu’une condamnation subie en face d’une si nombreuse assistance, abstraction faite du supplice, soit une peine légère. N’aimerions-nous pas mieux mille fois mourir que d’entendre notre condamnation sortir de la bouche de nos amis mêmes ?

Confusion des réprouvés. Nous n’aurons d’autres vêtements que nos œuvres.

Tremblons donc, mes frères, dans l’attente de ce jour si redoutable pour les méchants ; tremblons d’entendre sortir notre arrêt de mort de la bouche de celui qui n’a besoin pour nous confondre, ni d’enquêtes, ni de témoins, ni d’accusateurs. Ne vous fiez pas aux ténèbres dont vous étiez enveloppés, lorsque vous péchâtes. Ne dites pas : C’est la nuit que j’ai donné un libre cours à mes honteuses passions, que je me suis livré aux opérations magiques ; c’est la nuit qui a couvert de ses voiles mes iniquités, aucun mortel n’en a été témoin. Il n’y a que ma conscience qui peut seule me les reprocher. Eb bien ! c’est cette conscience, qui déposera contre vous ; c’est elle qui vous accusera ; c’est elle qui prononcera votre arrêt, entre les réflexions et les pensées qui vous accuseront, ou vous défendront au jour où Dieu jugera par Jésus Christ tout ce qui est caché dans le cœur des hommes. (Rom 2,15-16) L’œil terrible du Juge vous forcera à dire toute la vérité, ou plutôt vous convaincra en dépit de votre silence. Car là vous comparaîtrez comme enveloppé de vos œuvres bonnes et mauvaises. C’est ce que le Juge (c’est-à-dire Jésus Christ) nous a notifié lorsqu’il a dit : Le Père ne juge personne, mais il a donné tout pouvoir au Fils de juger. (Jn 5,22) Le Père juge par le Fils, sans se dépouiller de son autorité suprême, Ainsi le Fils juge de l’aveu du Père, parce qu’il n’y a pas deux volontés entre le Père et le Fils, et que celle de l’un est essentiellement celle de l’autre.

Que dira donc le Juge ? Faudra-t-il, oui ou non, produire le tableau de toute votre vie ? Toutes les nations, s’assembleront devant lui. (Mt 25,32) Car il faut que tout genou dans le ciel, sur la terre et dans les enfers fléchisse devant le Christ. (Ph 2,10) Puis il séparera les uns d’avec les autres, comme un berger sépare les brebis d’avec les boucs. (Mt 25,32) Et comment le pasteur opère-t-il cette séparation ? Va-t-il chercher dans un registre les individus inscrits sous le nom de brebis ou de bouc ? Ne les juge-t-il pas à leur aspect particulier ? N’est-ce pas à la laine qu’il reconnaît la brebis ? N’est-ce pas cette peau velue, brune, puante, rude, qui lui indique le bouc ? Eh bien ! telle sera votre image. Si vous êtes purifié de vos péchés, toutes vos œuvres seront pour vous la toison de la brebis, la laine la plus blanche (Is 1,18) ; votre vêtement sera sans tache, et vous direz toujours : Je me suis dépouillé de ma robe ; comment la reprendrai-je ? (Can 5,3) C’est donc à la toison que vous serez reconnu comme brebis ; mais si un poil long, rude et âpre vous trahit, découvre en vous un esprit sauvage et rétif, comme dans Esaü qui pour de vils aliments sacrifia ses droits les plus précieux, vendit sa prérogative la plus noble, celle de premier-né (Gen 25,33) vous serez rejeté au côté gauche.

Que le ciel détourne de dessus vos têtes le malheur d’être infidèles à la grâce, ou d’être par vos péchés rejetés au nombre des réprouvés.

 

Moyens de se soustraire à la rigueur de ce tribunal

Oui, le jugement dernier est fait pour nous glacer d’effroi, en raison des suites terribles que les Livres saints nous en font connaître. C’est du royaume des cieux ou du feu éternel qu’il s’agira pour nous dans cet instant redoutable. (Mt 25,46)

Comment, dira-t-on, pourrons-nous échapper aux feux éternels ? Comment pourrons — nous prendre possession du royaume des cieux ? Comment ? Eh ! le Seigneur vous l’a dit : J’ai eu faim, vous m’avez donné d manger. (Ibid. 35) Voilà le comment. Ici il n’y a point de paraboles, point d’allégories, il ne s’agit que d’exécuter à la lettre ce qu’il nous dit : J’ai eu faim, vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, vous m’avez donné à boire ; j’ai été sans asile, vous m’avez recueilli sous le toit hospitalier ; j’ai été nu, vous m’avez revêtu ; j’ai été malade, vous m’avez visité ; j’ai été en prison, et vous êtes venu d moi. (Ibid. 36) Voilà comment vous pourrez vous soustraire aux malheurs éternels qui nous menacent tous : faites ce qu’il vous a dit, et vous régnerez avec lui ; méprisez ce qu’il a dit, et vous serez impitoyablement condamné.

Sans plus tarder, mettez-vous à l’œuvre. Persévérez dans la foi, gardez-vous d’imiter les vierges folles, et de vous exposer, après avoir acheté votre huile, à trouver les portes fermées. (Mt 25,10-12) N’allez pas croire qu’il vous suffira d’avoir votre lampe à la main ; il faudra encore qu’elle brûle. Il faudra que votre lampe, c’est-à-dire, l’éclat de vos bonnes œuvres brille aux yeux des hommes, et que votre exemple ne donne pas aux autres l’occasion de blasphémer le nom de Dieu. (Rom 2,24) Revêtez-vous du manteau de l’incorruptibilité (I Cor 15,53) et de l’éclat des vertus. (I Tim 2,10) Soyez exact et fidèle dans toute administration que la Providence vous aura confiée. Est-ce de l’argent qu’elle a remis entre vos mains ? Dépensez-le selon ses vues. Vous a-t-elle constitué l’économe de la parole de vérité ? Mettez-vous en état de rendre un compte fidèle, comme un digne et fidèle serviteur. Vous a-t — elle donné le don de la parole (II Tim 2,25) celui de réduire sous le joug de la foi l’esprit de vos auditeurs ? (Ac 21,40) Acquittez-vous-en comme un fidèle mandataire. Dans le service de Dieu, mille portes sont ouvertes à l’ardeur du zèle. Toutes les fonctions y sont nobles. Prenons garde seulement que, pendant que nous marchons avec confiance au-devant du Roi éternel, de Jésus Christ qui règne dans les siècles des siècles, quelqu’un d’entre nous ne soit frappé de réprobation. Car le règne est éternel de celui qui juge les vivants et les morts, et qui est mort pour les uns et pour les autres. Car, comme dit l’Apôtre, c’est pour cela même que le Christ est mort, c’est pour avoir un empire souverain sur les morts et sur les vivants. (Rom 14,9)

 

Explication de ces mots : et son règne n’aura point de fin.

Si par hasard vous entendez dire à quelqu’un que le règne de Jésus Christ doit avoir un terme, anathématisez sans crainte cette doctrine. C’est une nouvelle tête que l’hydre de l’hérésie vient encore de lever dans les environs de la Galatie. Un nouveau suppôt de l’esprit de ténèbres a osé prêcher que la fin du monde serait aussi la fin du règne de Jésus Christ. Il a été assez téméraire, pour établir, en point de doctrine, que le Verbe émané du Père par la génération rentrerait alors dans le sein de son Père pour n’en plus sortir. Cet apôtre d’impiété n’a jamais entendu ces paroles du Sauveur : L’esclave ne demeure pas toujours en la maison, mais le Fils y demeure toujours (Jn 8,35) ni celles de l’archange Gabriel qui a dit : Et il régnera sur la maison de Jacob éternellement, et son règne n’aura point de fin. (Luc 1,32-33) Voilà ce qui est écrit. Voilà les paroles auxquelles des hommes sont assez pervers pour donner un démenti. Auquel des deux ajouterez-vous foi ? Ou aux paroles de l’archange, ou au téméraire qui se met en contradiction formelle avec lui ?

Remontons plus haut. Écoutons le prophète Daniel : Je voyais dans une vision de la nuit ; et voilà qu’avec les nuées du ciel je vis venir comme qui dirait le Fils de l’homme. Il parvint jusqu’à l’Ancien des jours. Il lui fut donné honneur, principauté, empire ; et tous les peuples, toutes les tribus, toutes les langues le serviront. Sa puissance qui sera éternelle ne passera pas, et son royaume ne sera jamais détruit. (Dan 7,13-14) Tenez-vous-en à ces paroles ; elles sont plus sûres que celles qui sortent de la bouche de l’hérésie. Ces témoignages que vous venez d’entendre sont assez positifs pour vous convaincre que le règne du Christ n’aura jamais de fin.

Vous avez quelque chose de semblable dans l’explication de la pierre qui se détache d’elle-même de la montagne. (Dan 2,34) Cette pierre est la figure de Jésus Christ incarné, dont l’empire ne tombera pas entre les mains d’un autre peuple. (Ibid. 44)

Le Roi-Prophète nous dit aussi quelque part : Votre trône, ô Dieu, subsistera éternellement. (Ps 44,7) Vous avez, Seigneur, dit-il ailleurs, vous avez ; dès le commencement jeté les fondements de la terre ; ils périront, mais vous existerez à jamais ; mais vous êtes toujours le même, et vos années ne passeront pas. (Ps 101,26-28) Telles sont les paroles dont l’Apôtre fait l’application à la personne de Jésus Christ même. (Heb 1, 8, 10 etc.)

Objections des hérétiques

Voulez-vous connaître la source où ces docteurs ont puisé leur délirante doctrine ? C’est dans ces paroles de l’Apôtre qu’ils lisent mal, et qui sont néanmoins très claires : Car il faut qu’il règne jusqu’à ce qu’il ait mis tous ses ennemis sous ses pieds. (I Cor 15,25 ; Ps 109,1) De là ils argumentent et disent : Son règne cessera donc lorsqu’il aura subjugué tous ses ennemis. Folie ! Absurdité ! Est-ce que celui qui a régné tant, qu’il avait des ennemis à combattre, cessera de régner lorsqu’il n’en aura plus ? Son empire ne sera-t-il d’autant plus stable, qu’il ne rencontrera plus d’adversaires ?

Le même Apôtre a dit encore : Lorsque toutes choses auront été assujetties au Fils, alors le Fils sera lui-même assujetti à celui qui lui aura assujetti toutes choses. (Ibid. 28) De ces paroles ils ont follement conclu qu’alors le Fils rentrerait dans le sein de son Père. Ô folie ! Ô extravagante impiété ! Quoi ! Vous qui êtes l’œuvre de ses mains, vous aurez l’immortalité en partage, et le Christ qui vous a créé, vous et tout ce qui existe, rentrera dans le néant ! Quel épouvantable blasphème ! Comment toute la création lui sera-t-elle soumise ? Sera-ce dans le néant, ou dans son existence ? Dans ce dernier cas, ce qui sera soumis au Fils sera impérissable, et le Fils soumis au Père périra ?

Oui, il sera soumis ; ce n’est pas à dire qu’alors seulement il commencera à faire la volonté de son Père ; car de toute éternité il a fait ce qui lui était agréable. (Jn 8,29) Mais c’est qu’alors son obéissance sera spontanée, sans contrainte, sans nécessité. Car il n’est pas esclave, soumis aux lois de la nécessité ; mais il est Fils, et comme tel il obéira par sentiment et par amour.

 

Explication grammaticale de ces mots latins usque, donec, jusqu’à ce que.

Demandons-leur ce qu’ils entendent par ces mots : Jusqu’à quand, jusqu’à ce que, et quel sens ils leur attachent. Car quant à moi, c’est avec ces mots, sans changer de terrain, que je vais mettre au jour leur erreur grossière. Et, puisqu’ils sont assez audacieux, pour appuyer leur doctrine mensongère sur ces paroles de l’Apôtre : Jusqu’à ce qu’il ait mit ses ennemis sous ses pieds, pour en conclure que son règne aura une fin, et pour effacer par des bornes l’éternité de son empire, lisons ensemble ces autres paroles du même Apôtre : Cependant la mort a régné depuis Adam jusqu’à Moïse. (Rom 5,14) Est-ce que la mort qui avait régné jusqu’à Moïse a cessé d’exercer ses rigueurs sur le genre humain, après le décès du législateur ? Vous voyez donc clairement que le mot : jusqu’à ce que, n’indique pas dans le style hagiographique une époque finale ; qu’au contraire. Saint Paul a voulu dire que, quoique Moïse eût été un homme juste et admirable, la mort qui, depuis Adam jusqu’à lui, avait frappé indistinctement tout le genre humain, ne l’avait pas plus épargné que les autres, malgré qu’ils n’eussent pas péché comme Adam, en mangeant du fruit défendu.

 

L’aveuglement des Juifs durera jusqu’à la consommation des siècles

Voici encore un autre passage du même Apôtre : Car jusqu’à ce jour un voile a été posé sur leur cœur, lorsqu’ils lisent Moïse. (II Cor 3,14) Ce mot : jusqu’à ce jour, ne s’étend-il que jusqu’à Paul ? N’embrasse-t-il pas tous les siècles à venir jusqu’à leur consommation ? Si le même Apôtre dit aux Corinthiens : Car nous sommes arrivés jusqu’à vous, en prêchant l’Évangile de Jésus Christ, dans l’espérance que votre foi toujours croisante nous permettra de porter l’Évangile aux nations plus éloignés que vous (II Cor 10,14-15) ne voyez-vous pas que le mot : jusque, loin de mettre un terme à la prédication de Paul, en indique au contraire la continuation ?

Dans quel sens devez-vous donc prendre ces mots : Jusqu’à ce qu’il ait mis ses ennemis, etc. ? Dans le même sens que Paul a dit ailleurs : Exhortez-vous chaque jour les uns les autres, pendant que ce temps s’appelle aujourd’hui (Heb 3,13) c’est-à-dire toujours, sans discontinuer. Car de même qu’on ne peut dans le temps assigner à Jésus Christ un principe quelconque (Heb 7,3) vous ne devez également pas souffrir qu’on fixe un terme à la durée de son règne, ainsi qu’il est écrit : Son règne est un règne éternel. (Dan 3 100)

Conclusion

J’aurais encore beaucoup d’autres témoignages des Livres saints à vous apporter en preuves de la perpétuité du règne de Jésus Christ ; mais l’heure avancée me force à me borner à ce que je viens de vous en citer.

Au reste, mon cher Auditeur, souvenez-vous bien que vous ne devez adorer que ce seul Roi, que vous devez rejeter au nombre des hérétiques, et par conséquent fuir tous ceux que vous verrez s’écarter de cette doctrine. Si Dieu m’en fait la grâce, je vous expliquerai ce qui vous reste à savoir sur le symbole.

Que Dieu, auteur et principe de toutes grâces, vous couvre de sa protection, vous fasse celle de ne pas perdre le souvenir des signes avant-coureurs de la consommation des siècles, et de ne pas tomber sous la puissance de l’Antichrist.

Vous avez entendu les caractères distinctifs auxquels vous reconnaîtrez l’imposteur des derniers temps, les preuves de l’avènement du vrai Christ qui descendra encore des cieux, et se manifestera aux yeux de tous.

Fuyez donc en face de l’erreur et du mensonge, et attendez en paix l’Auteur de toute vérité. Vous connaissez le chemin sur lequel vous devez être, pour avoir une place à droite, au jugement dernier. Gardez le dépôt qui vous a été confié (I Tim 6,20) ; ornez-vous de bonnes œuvres (I Tim 2,10) pour paraître avec confiance en présence du souverain Juge, et pour entrer en possession du royaume céleste : Je vous en conjure par Jésus Christ, par qui et avec qui gloire est à Dieu, avec le saint Esprit dans les siècles des siècles. Amen.

Œuvres complètes de Saint Cyrille, patriarche de Jérusalem, traduites du grec sur l’édition du Père Touttée de 1727, avec des notes historiques et critiques par M. Ant. Faivre, Tome second, p. 106-158, Lyon, 1844

 

 

 

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