Les pères de la foi, Luminaires de l'Église, Orthodoxie

Homélie pour le Dimanche des Rameaux par saint Proclus de Constantinople

25 avril 2021

La fête que nous célébrons, mes frères, demande toute notre attention et tous nos soins; il faut que nous témoignions de la promptitude, et de l’empressement pour aller au-devant de notre Roi, qui vient à nous. C’est ce que nous dit l’Apôtre en nous apprenant cette heureuse nouvelle; Le Seigneur est proche, ne vous inquiétez de rien (Phil 5,4) : ce n’est pas par notre vitesse; c’est par nos bonnes œuvres que nous le trouverons. Il est encore fort à propos de nous ressouvenir de cette maxime de l’Apôtre : La nuit est déjà fort avancée, et le jour s’approche, quittons donc les œuvres de ténèbres, et revêtons-nous des armes de la lumière; marchons avec bienséance, et avec honnêteté, comme marchant durant le jour. (Rom 14,12)
 


 
Allumons le flambeau de la foi; fournissons-nous de l’huile de la miséricorde à l’exemple des Vierges sages et demeurons sur nos gardes, et veillons pour attendre la venue de Jésus Christ; chantons des hymnes à la louange de la justice et parfumons les pieds du Sauveur, comme fit Marie : écoutons ce qu’il dit à Dieu après sa Résurrection; donnons à Dieu des louanges digne de sa Majesté; chantons avec le peuple de Jérusalem : Gloire dans les cieux; béni soit le Roi d’Israël, qui vient au nom du Seigneur. (Ps 144,18) Il vient à nous, et il ne s’en éloigne jamais; Le Seigneur ne manque pas d’ajuster tous ceux qui implorent son secours, et qui l’invoquent avec un cœur sincère, et véritablement contrit. Tout ce qui se passe dans la fête que nous célébrons, ce sont des symboles et des figures d’une marche royale. Lors que le peuple se prépare à recevoir un roi qui doit faire son entrée dans une ville, il aplanit les chemins par où le Prince doit passer, on couronne de fleurs les portes des maisons; on ajoute de nouveaux ornements à la ville; on n’épargne rien pour rendre le palais propre et magnifique, l’on dispose dans tous les quartiers des chœurs de musique, pour célébrer ses louanges. Ces préparatifs sont des signes de l’entrée que le prince doit faire dans une ville. Voilà à peu près ce que nous devons faire : nous devrions même préparer de plus grandes magnificences; car comme la dignité du Roi céleste est infiniment au-dessus de celle des autres Rois; ainsi les devoirs que nous lui rendons doivent croître à proportion.

Voilà ce Roi débonnaire, et pacifique, qui est à la porte de notre ville; les chérubins lui servent de trône dans le ciel : mais sur la terre, il se contente d’une ânesse; préparons notre âme, afin qu’il y vienne faire sa demeure; bannissons-en la haine et les animosités que nous pourrions avoir contre nos frères; prenons garde qu’on ne nous trouve coupables de quelques blasphèmes : que notre cœur soit une vive source de charité, et qu’il soit inaccessible à toute sorte d’inimitié; que nos lèvres s aient des organes de la piété; récrions-nous avec la foule, et disons, Béni soit le Roi d’Israël, qui vient au nom du Seigneur : quelles louanges ne devons- nous pas donner à ce peuple religieux ennemi des chefs Juifs, et ami des chrétiens; il donne à Jésus Christ le nom de Roi, quoiqu’il n’aperçoive en sa personne aucune marque de royauté. On ne voit pas à sa suite des chats dotez, ni des mules blanches, ni de vaine pompe, qui est un signe d’ostentation, et dont les Rois de la terre ne manquent guère de se parer aux jours de cérémonie; on ne voit ni armes, ni boucliers, ni étendards, ni d’hommes bien faits montez sur des chevaux richement harnachés; on ne conduit pas d’éléphants, qui sont le plus grand ornement des triomphes; le Sénat ne marche pas devant; on ne voit rien qui frappe les yeux, tout ce qu’on voit en cette fête est contraire à la magnificence d’un triomphe.

On n’y voit qu’une ânesse avec un ânon, encore les avait-on empruntés; le Sauveur n’était accompagné seulement que de onze disciples : car Judas tramait déjà sa noire trahison; cependant le peuple touché de cet équipage, tout pauvre qu’il était, comme s’il eût été inspiré du ciel, s’écrie presque du même ton que les séraphins, Beni soit le Roi d’Israël, qui vient au nom du Seigneur.

Les Scribes et les Pharisiens entendaient avec douleur les acclamations de ce Peuple; le titre de Roi d’Israël, qu’on donnait au Fils de Dieu, les chagrinait; ils disaient que Jésus Christ était possédé du démon; mais le peuple continuait toujours à l’appeler Roi : Beni soit le Roi d’Israël, qui vient au nom du Seigneur : Qui est-ce qui a suggéré à ce peuple de donner le titre de Roi au Messie ? qui est-ce qui lui a appris à le louer de la sorte ? qui lui a inspiré de prendre des branches de palmier ? qui est-ce qui l’a assemblé de la sorte, pour dire la même chose, comme de concert ? sans doute c’est un effet de la grâce, et de l’inspiration du saint Esprit : voilà pourquoi tout ce Peuple criait avec beaucoup de liberté, et sans craindre les menaces des Pharisiens; Beni soit le Roi d’Israël, qui vient au nom du Seigneur. Les habitants de la terre, et ceux du ciel, les hommes, et les anges, les mortels avec les immortels, disaient la même chose. Tandis que les Scribes et les Pharisiens faisaient tous leurs efforts, pour imposer silence aux hommes, et que les Princes des Prêtres ne vomissaient que des blasphèmes, les anges donnaient mille louanges à Dieu; ils ont répandu la joie sur toute la nature, ils ont sanctifié le ciel; ils ont communiqué leurs sentiments aux morts mêmes; ils ont ouvert la porte du Ciel; ils ont animé les mortels à les imiter. Quelques païens qui virent ce que les Juifs faisaient, remplis du zèle que ces acclamations leur inspiraient, allèrent trouver un des disciples dans l’intention de se convertir, et lui dirent; Seigneur, nous voulons voir Jésus.

Voilà l’effet de la piété du peuple, qui fut l’occasion de la conversion des païens, qui témoignèrent immédiatement aux disciples l’empressement qu’ils avaient de voir Jésus. Ces païens devinrent en quelque manière les disciples de Zachée; ils ne montèrent cependant pas, comme lui, sur le Sycomore; éclairés des rayons d’une science toute divine, ils désirent d’abord de voir Jésus : ce n’était pas tant l’envie qu’ils avaient de voir son visage, que de l’aider à porter sa Croix. Le Fils de Dieu qui connaissait leur intention, leur dit d’une voix claire et intelligible; L’heure est venue, que le fils de l’Homme doit être glorifié (Jn 12,23); voulant dire que la conversion des Gentils lui procurait beaucoup de gloire; les Gentils ont embrassé avec ardeur ce que les Juifs ont méprisé : c’est pour cela qu’il leur faisait ces reproches, par l’un de ces prophètes : Si je fuis votre Père, où est l’honneur que vous devez me rendre; si je fuis votre Maître, où est la crainte que vous devez avoir de moi ? (Mal 1,6) mais il disait en parlant des païens; L’heure est venue que le Fils de l’homme doit être glorifié : mettant sa gloire dans l’opprobre de la Croix. C’est en quoi il a fait connaître sa toute-puissance, faisant servir à sa gloire un sujet si plein d’infamie; il a changé les opprobres en honneurs, les exécrations en bénédictions, l’amertume en douceur, le fiel en lait, la servitude en liberté, la mort en la vie. L’heure est venue que le Fils de l’Homme doit être glorifié.

Depuis ce temps-là, la Croix a été révérée par toute la terre, elle fait honneur aux Rois; les Prêtres s’en font un ornement; elle sert de garde à la virginité; c’est l’appui de la vie religieuse; elle resserre les nœuds du mariage; elle soutient les veuves, elle protège les orphelins; elle augmente la fécondité; elle multiplie les sujets de l’Église; elle éclaire les fidèles; elle peuple les solitudes; elle ouvre la porte du Paradis; elle en a montré le chemin à un voleur; elle étouffe les haines et les dissensions; elle donne la chasse au démon.

Prenons des branches de palmiers en nos mains, et allons au-devant de notre Maître; interrogeons les prêtres, et demandons-leur s’ils ne disent pas que Jésus Christ n’est que le Fils d’un charpentier; disons-leur qu’il est le Dieu fort et puissant; courez tous avec joie au-devant de celui qui a ressuscité Lazare; récriez-vous avec tout le peuple, Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur; que la gloire lui soit rendue dans les siècles éternels.

 


 

Les œuvres de St Clément d’Alexandrie traduites du grec avec les opuscules de plusieurs autres pères grecs par N. Fontaine, André Pralard, Libraire, Paris, 1696, pp. 378-382

Homélie disponible en format numérique [pdf] sur le site des Vrais chrétiens orthodoxes francophones

 


 

 

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