Orthodoxie

La conversion d’un athée en prison

29 décembre 2020

Dinu P. apprend tout à fait par hasard, de la bouche du père Toadea comment est mort son beau-père, le social-démocrate Gh. Ene Filipescu.

À Târgu-Ocna, à l’hôpital pour les détenus politiques tuberculeux qui a fonctionné jusqu’en 1956, (parce qu’après, il n’y a plus eu d’hôpitaux pour les détenus) Filipescu clamait ses opinions politiques socialistes et athées dans une salle pleine de jeunes légionnaires. Il est vrai qu’il apostrophait aussi les gardiens, ces « enfants qui insultent leurs parents » (Roubatchov dans L’obscurité à midi ou Le Zéro et l’infini).

Il allait de plus en plus mal, la maladie évoluait rapidement et il a beaucoup souffert, jusqu’à sa mort (la respiration était devenue une torture).

Les jeunes légionnaires se sont conduits si merveilleusement avec lui, avec tant d’abnégation, d’attention, d’affection à son égard, ils ont manifesté un si profond respect à cet homme plus âgé qu’eux, qu’ils ont fini par attendrir son cœur.

Avant de rendre l’âme — avec difficulté, car chaque souffle était devenu un spasme —, Filipescu a serré dans ses bras celui qui s’était tout particulièrement dévoué pour lui, et ensuite tous les autres, il a réussi à se confesser au père Toadea, et a communié avant de mourir. Quelques jours plus tard, le garçon qui l’avait soigné comme un fils s’est éteint lui aussi.

(J’ai appris par loan lanolide, qu’il s’agissait de nul autre que Valeriu Gafencu, l’un des « saints des prisons ».)

 

Psaume XXXVIII, 18 : « Détourne ton regard, que je respire/avant que je parte, et plus rien de moi. »

 

Nicolae Steinhardt, Journal de la félicité, pp. 196-197
Traduit du roumain et annoté par Marily Le Nir, Arcantère Éditions, Paris, 1995

Publié ici avec l’aimable autorisation de Mme Le Nir

 


 

 

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