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Les sermons de carême du père Gheorghe Calciu – III

20 octobre 2019

Ciel et terre

Paroles prononcées à l’église de Radu-Voda, le deuxième mercredi du grand carême, le 22 mars 1978

traduction: hesychia.eu

« Mais nous attendons, selon sa promesse, de nouveaux cieux, et une nouvelle terre, où la justice habite… »
II Pierre 3:13

Je m’adresse à nouveau à toi, jeune homme, car c’est toi que j’ai choisi parmi tous ceux à qui j’aurais pu m’adresser ; car tu es le plus capable à écouter la parole du Christ, tu es noble et pur, car l’éducation athée n’a pas encore réussi à ternir le ciel en toi. Tu continues de regarder vers le haut, tu peux encore entendre les appels d’en haut ; ton envol vers les sphères célestes n’a pas été enfermé par les barreaux des conceptions arbitraires. Pour toi, l’aspiration vers le ciel existe, la matière ne t’a pas fait son prisonnier. C’est pourquoi, jeune homme, je t’appelle sept fois, car sept est le nombre des prières du jour, tel que le psalmiste le dit : « Sept fois par jour je t’ai loué, pour tes justes décisions » (Psaume 119, 164).


Aujourd’hui, nous allons parler du ciel et de la terre. Je ne te ferai pas peur, mon ami, avec les images effrayantes de la fin du monde. Chaque jour, la mort est devant nous : sa présence est plus etouffante que la vie, plus réelle qu’elle, car la mort est notre cauchemar de chaque instant. Tu vis à proximité de la mort, mon ami, et tu n’y-t-es pas encore habitué, car tu es vivant et authentique, plus vivant et plus authentique que tu ne l’imagines toi-même.

 

Evangile illuminé

Evangile illuminé de la fin du XIVe-début du XVe siècle

Un ciel et une terre… Je me souviens d’un poème. Quelqu’un le récitait à la télévision, le poète lui-même. Il tenait sa main droite levée, il avait un visage délibérément inspiré et récitait d’une façon monotone, essayant de provoquer une sorte de transe chez le public. Chaque vers était répété par un chœur d’enfants — fausse litanie, imposée par la circonstance : « Vous pouvez compter, ciel, par un, par deux, par trois… » – et ainsi de suite, jusqu’à dix.
C’était une imprécation, un défi qu’il lançait au ciel. Essentiellement, la poésie que j’ai écoutée expliquait comment le ciel pouvait compter le poète et ceux qui l’accompagnaient, par un, par deux ou par trois, autant qu’il le voulait, mais il ne pouvait pas les vaincre. C’était l’idée. Il était un poète athée et un fervent partisan du matérialisme.
Mais quel était le « ciel » à qui il s’adressait ? S’agissait-il de « l’étendue » constituée des couches successives de l’atmosphère ? Cela aurait été un monologue sans sens. Le poète, d’après la conviction avec laquelle il parlait, s’adressait à quelqu’un qui pouvait l’entendre et même « le compter ». Étrange, parce que ce n’était pas une personnification (devenue si triviale pour la poésie), mais il croyait véritablement qu’il était entendu et que son défi était un acte d’héroïsme. Il s’adressait au ciel métaphysique, qu’il se forçait à diminuer et à nier tout en l’affirmant !
C’est précisément sur ce ciel que je veux te parler ici, mon ami.
« Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. »
Un ciel et une terre, une immanence et une transcendance, le donné matériel et une aspiration vers la perfection ; un espace soumis au temps, d’une part, et une existence a-spatiale et a-temporelle, de l’autre.
Depuis ce moment et jusqu’à présent, nous gardons en nous la nostalgie de notre intégration dans le ciel de Dieu ; depuis lors, et jusqu’à présent, nous n’avons pas oublié un seul instant que là se trouve le centre auquel aspire le ciel en nous.
Dis-moi, jeune homme, combien as-tu cru en l’affirmation que tu as entendue répété sans arrêt à l’école, à la radio, à la télévision, dans les journaux, lors de rassemblements de jeunes, à savoir que tu descends du singe ? Et combien tu t’es senti honoré par une telle ascendance ?
Noam Chomsky (linguiste américain, père de la grammaire générative) a déclaré que « les personnes les plus stupides apprennent à parler, mais que les plus intelligents des singes ne pourront jamais le faire »…
Et maintenant, voici, une voix du ciel qui s’adresse à toi : « Tu es mon fils ! » Et, comme avec Jésus alors qu’il vivait dans le monde, la voix te confirme : « Je t’ai glorifié et je te glorifierai encore. » (Jean 12,28)
Tu es terre et ciel, ténèbres et lumière, péché et grâce.
Je sais, mon ami, que les questions sur le sens de ton existence dans le monde et sur le but de ce monde en général te tourmentent. À ta question limitée, as-tu été satisfait par la réponse déjà faite et imposée par l’autoritarisme : « Le ciel est une fiction, la matière est tout ; elle te parle à travers tes sens internes et externes » ?
C’est la matière qui a organisé sa structure et son évolution selon des lois si complexes, avant même le moindre rudiment cérébral, que lorsque le cerveau supérieur de l’homme est apparu, le seul moyen de se reconnaître par la matière elle-même, elle n’a pas réussi à se reconnaître ! Depuis lors, et jusqu’à ce jour, elle lutte dans un effort stérile et pitoyable pour découvrir les lois que la matière inerte a établies à une époque où il n’y avait que l’obscurité et l’inconscience !
Que penses-tu de ce jeu de la non-intelligence qui annule toute intelligence humaine, même collective ? Vois-tu que même la logique la plus élémentaire t’oblige à admettre une intelligence située à l’extérieur du monde ?
Mais, moi je t’appelle à un vol beaucoup plus haut, à ton abandon total, au courage qui défie la raison ; je t’appelle à Dieu. À ce qui transcende le monde, afin de connaître le ciel infini, avec ses joies spirituelles, le ciel que tu devines seulement dans ton enfer, dans ta recherche et même dans ton état de rébellion gratuite.
Ce ciel, avec sa hiérarchie divine, avec la lumière divine qui descend graduellement avant de remonter ultérieurement à sa source propre, qui est Dieu, ne nous compte pas par deux ou par dix. Parce que, en présence du ciel, mon ami, tu n’es pas une pauvre pièce prise dans un engrenage qui t’écrase, mais tu es une âme, un tout, si libre dans tes actes, si digne d’appréciation, que Dieu Lui-même, par la deuxième personne de la Sainte Trinité, est venu dans le monde pour être crucifié pour toi.
Combien ridicule doit te paraître maintenant le défi du poète qui croyait si fermement au ciel qu’il sentit le besoin d’associer la chorale des enfants à son imprécation, pour lui servir de bouclier !
Ne crois pas, jeune homme, au pouvoir illimité de la matière ! La terre est finie, la matière peut être épuisée en quelques minutes, par scissions successives, jusqu’à ce qu’elle disparaisse, atteignant, si nous n’admettons pas Dieu, au néant. Tu vois bien que les revendications absolues du matérialisme reposent sur un support limité. Tu vois bien que les attributs accordés à la matière — infinie, éternelle, autogénératrice — sont des notions purement spirituelles. Nier le ciel, c’est nier toute existence qui n’est par reconnue par mes sens. Nier l’esprit, c’est admettre que, dès que j’ai fermé les yeux et que je me suis bouché les oreilles, le monde cesse d’exister.
Et maintenant, mon ami, je veux te réciter le plus beau poème jamais écrit sur le ciel et sur la terre. C’est le début de l’Évangile de Jean :
« Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et cette parole était Dieu.
Elle était au commencement avec Dieu. Toutes choses ont été faites par elle, et sans elle rien de ce qui a été fait, n’a été fait.
En elle était la vie et la vie était la lumière des hommes. Et la lumière luit dans les ténèbres, mais les ténèbres ne l’ont point reçue. » (Jean 1,1-5)
Comment les ténèbres pourraient-elles enfermer la lumière, la matière éteindre l’esprit, l’athéisme annuler la foi en Dieu ou la contrainte nous obliger à perdre notre désir de liberté ?
Le ciel ne compte que toi seul et seulement toi, chacun à part, toi, être unique et irremplaçable, mon ami, être humain !

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